Dans un contexte de menaces sécuritaires croissantes et de préoccupations environnementales, le Mali et le Sénégal intensifient leur coopération bilatérale, dépassant les divergences politiques au sein de la Cédéao pour privilégier une approche pragmatique.
Le 20 février 2025 marque une avancée significative avec le lancement officiel des patrouilles conjointes dans la région frontalière de Diboli, près de Kayes. Cette initiative vise à contrer la menace grandissante du groupe jihadiste JNIM, responsable de multiples attaques et de l’assassinat de figures religieuses soufies proches de Dakar. Mobilisant la Zone militaire N°4 et le GARSI côté sénégalais, cette opération repose sur l’expérience des patrouilles tripartites menées en septembre 2024 avec la Mauritanie.
Les 10 et 11 septembre 2024, des opérations de surveillance terrestre et fluviale avaient déjà été conduites dans les zones de Diogountourou (Mauritanie) et Aroundou (Sénégal), consolidant un accord militaire signé en mars 2021 entre Bamako et Dakar.
Au-delà des enjeux sécuritaires, la coopération entre les deux pays s’étend à l’économie régionale, avec le corridor commercial Dakar-Bamako comme axe stratégique. En 2022, le Mali représentait 50,5 % des exportations sénégalaises vers l’Afrique, soit un volume de 1 404,5 milliards FCFA. La visite du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye au Mali en mai 2024 a renforcé cette dynamique d’échanges.
Sur le plan diplomatique, plusieurs visites de haut niveau témoignent de cette intensification des relations. Le 12 août 2024, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko s’est entretenu avec le président malien Assimi Goïta à Bamako. Le 17 octobre, le professeur Abdoulaye Bathily, envoyé spécial du président sénégalais, a également été reçu à Bamako après une rencontre avec son homologue burkinabè Ibrahim Traoré une semaine plus tôt.
L’environnement constitue un autre pilier majeur de cette collaboration. Lors de la COP16 à Cali (Colombie), les ministres de l’Environnement des deux pays, Mamadou Samaké et Daouda Ngom, ont discuté des impacts de la pollution de la Falémé. Ces échanges ont conduit à des mesures concrètes, dont l’interdiction du dragage dans le nouveau code minier malien et des restrictions sur l’exploitation aurifère au Sénégal.
Cette coopération se maintient malgré le retrait officiel du Mali de la Cédéao en janvier 2025, aux côtés du Burkina Faso et du Niger, pour la formation de la Confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES). Le président sénégalais joue un rôle clé en tant que facilitateur dans cette crise régionale.
Les actions civilo-militaires conjointes, comme les consultations médicales gratuites dans les zones frontalières, soulignent également la dimension humanitaire de cette coopération. Dans un contexte marqué par des catastrophes naturelles, telles que l’accident du 26 août à Nabaji Civol où cinq personnes ont disparu après le choc d’une pirogue contre un pont en construction, ces initiatives prennent une importance particulière.
Cette coopération multidimensionnelle illustre la profondeur des liens historiques et sociaux entre les deux pays. Comme l’a souligné le professeur Bathily lors de sa visite du 17 octobre 2024, « il n’existe pas une seule communauté au Sénégal qui ne soit liée à une autre au Mali.