La récente détérioration des relations diplomatiques entre le Mali et l’Algérie, exacerbée par l’incident impliquant l’abattage d’un drone malien par l’armée algérienne, engendre des conséquences économiques et sociales immédiates dans le nord du Mali, en particulier à Gao. Cette situation met crûment en évidence la dépendance stratégique de cette région vis-à-vis des importations algériennes.
Une dépendance devenue vulnérabilité
Gao, ville frontalière et carrefour commercial majeur, s’approvisionne historiquement en produits essentiels à partir de l’Algérie. Mais la rupture des échanges transfrontaliers, consécutive à la crise actuelle, a brusquement désorganisé la chaîne d’approvisionnement. Résultat : une flambée des prix sans précédent. Le litre d’essence, auparavant vendu à 800 F CFA, dépasse désormais les 4 500 à 5 000 F CFA dans certains quartiers. Cette envolée des prix touche également les denrées alimentaires de première nécessité telles que le riz, le sucre, l’huile, la farine et le lait, rendant le quotidien insoutenable pour la majorité des ménages.
Une précarité qui s’aggrave
Déjà affaiblies par les retombées économiques de la pandémie de Covid-19, les sanctions régionales et les défis sécuritaires, les populations de Gao font face à une nouvelle spirale d’appauvrissement. L’accès aux biens de consommation devient un luxe, alors que les pénuries d’eau et les coupures d’électricité continuent d’empoisonner la vie quotidienne. Le pouvoir d’achat s’effondre, creusant les inégalités sociales et exposant les plus vulnérables à l’exclusion.
L’alerte des acteurs locaux
Face à cette urgence, l’Union Régionale des Travailleurs de Gao (URT-Gao) tire la sonnette d’alarme. Dans une déclaration publique, elle dénonce l’absence de régulation du marché, le désordre dans la distribution des produits et appelle l’État à prendre des mesures concrètes pour soulager les populations. Les commerçants, eux, tentent de faire face à une rareté des marchandises sans précédent, mais se voient contraints de répercuter les hausses sur les consommateurs.
Une crise révélatrice des failles structurelles
Au-delà des tensions diplomatiques et militaires, cette crise révèle une réalité plus profonde : l’extrême fragilité économique des régions frontalières. Gao, comme d’autres localités du nord, paie aujourd’hui le prix d’une absence de diversification des sources d’approvisionnement et de l’insuffisance des infrastructures locales de production et de stockage.
Quelles pistes de sortie ?
Pour sortir de l’impasse, plusieurs leviers doivent être mobilisés. D’abord, un dialogue diplomatique urgent entre le Mali et l’Algérie s’impose pour rétablir les flux commerciaux. Ensuite, à l’échelle nationale, il est indispensable de renforcer les mécanismes de régulation des prix, de sécuriser les stocks stratégiques et d’ouvrir d’autres corridors d’importation, notamment via la Mauritanie, le Niger ou le Burkina Faso.
Des solutions durables doivent également passer par une politique d’investissement dans les filières locales de production, pour réduire la dépendance extérieure et garantir une résilience économique aux régions enclavées.
Une population en attente de réponses
En attendant, les habitants de Gao endurent au quotidien les effets de cette crise multiforme. Dans les foyers, l’inquiétude grandit, la colère monte, mais surtout, l’espoir persiste : celui de voir les autorités maliennes prendre la pleine mesure de la gravité de la situation, et agir, avec courage et responsabilité, pour soulager les souffrances d’une population déjà éprouvée par les turbulences du passé récent.







