Niamey et Abuja tentent de surmonter leurs différends dans un contexte régional en mutation.
Moins de deux mois après le retrait officiel des pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), et au lendemain d’une mission diplomatique ghanéenne visant à rapprocher l’AES de l’organisation régionale, le Niger et le Nigeria renouent progressivement le dialogue.
Ce mercredi, le ministre nigérien des Affaires étrangères, de la Coopération et des Nigériens à l’extérieur, Bakary Yaou Sangaré, a reçu l’ambassadeur du Nigeria à Niamey, Mohammed Sani Usman. Selon des sources officielles, cette rencontre s’inscrit dans un climat diplomatique encore marqué par des tensions persistantes, notamment en matière de sécurité transfrontalière.
Sécurité et coopération frontalière au cœur des discussions
Les échanges entre les deux responsables ont principalement porté sur la coopération bilatérale, avec une attention particulière accordée à la lutte contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière. L’un des points sensibles abordés concerne le nouveau dispositif de contrôle frontalier instauré par le Nigeria, qui suscite des inquiétudes du côté nigérien. Les deux parties ont convenu de l’importance d’une concertation sur l’utilisation de ce mécanisme et réaffirmé leur engagement en faveur d’une coopération renforcée face aux défis sécuritaires communs.
Une région en pleine recomposition
Cette rencontre intervient alors que le Niger, le Mali et le Burkina Faso ont officiellement acté leur départ de la Cédéao, bouleversant l’équilibre géopolitique sous-régional. Du 8 au 10 mars, le président ghanéen John Dramani Mahama a mené une tournée diplomatique dans les capitales des pays de l’AES, appelant à un dialogue pour éviter une rupture totale entre le bloc sahélien et la Cédéao.
Entre tensions et volonté de rapprochement
Depuis l’arrivée au pouvoir du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) en juillet 2023, les relations entre Niamey et Abuja ont été mises à rude épreuve. Le Nigeria, en tant que poids lourd de la Cédéao, a activement soutenu les sanctions imposées contre le Niger et n’a pas exclu une intervention militaire. Cependant, des signes d’apaisement ont émergé, notamment avec la visite du chef d’état-major des armées nigérianes à Niamey le 28 août 2024, qui a abouti à la signature d’un protocole d’accord sur la coopération sécuritaire.
Malgré ces efforts, des tensions persistent. Le président nigérien Abdourahamane Tiani accuse toujours le Nigeria de collusion avec la France pour tenter de déstabiliser son régime, des allégations fermement démenties par Abuja.
Dans ce contexte incertain, cette rencontre diplomatique illustre une volonté de dialogue entre deux acteurs majeurs de l’espace sahélien et ouest-africain, bien que les obstacles à une normalisation complète des relations restent nombreux.