Accolades, échanges de poignées de mains et sourires étaient de mise le 26 septembre 2024, lors de la session spéciale de la Cour d’assises qui examinait l’affaire de « l’Avion présidentiel » et des « équipements militaires ». L’ancienne ministre de l’Économie et des Finances, Bouaré Fily Sissoko, poursuivie dans cette affaire, s’est montrée sereine tout au long de l’audience. Les débats ont notamment tourné autour d’une question cruciale : qui a autorisé le paiement de 15 milliards de FCFA ?
Vêtue d’un tissu vert foncé, l’ancienne ministre semblait détendue face aux juges. La séance du 26 septembre portait principalement sur ce paiement de 15 milliards de FCFA, correspondant à 80 % du prix de l’avion présidentiel, déboursé par le Trésor national. Qui a validé ce paiement ? Cette question a dominé la matinée des débats.
Selon Ben Bouyé Haïdara, ancien Directeur national du Trésor et de la Comptabilité publique, le dossier d’achat de l’avion était directement géré par la ministre des Finances. Il affirme que le Trésor a procédé aux paiements sur la base d’une lettre émise par la ministre, et ce, avant même la signature du contrat d’achat.
Bouaré Fily Sissoko, quant à elle, réfute catégoriquement ces affirmations, assurant qu’elle n’a jamais été informée de ce paiement de 15 milliards de FCFA. Si l’ancien directeur du Trésor admet avoir autorisé le paiement, il précise qu’après avoir constaté l’absence de l’approbation formelle du ministre, il lui a soumis une lettre de régularisation, que la ministre aurait lue et signée.
Répliquant vivement, Bouaré Fily Sissoko a demandé à Ben Bouyé Haïdara de fournir la preuve du bordereau par lequel elle aurait autorisé ce paiement. Elle a insisté que tous ses paiements étaient toujours appuyés par des factures ou des bordereaux de paiement.
Les débats se sont ensuite orientés vers les services annexes à l’achat de l’avion, tels que les honoraires d’avocat, les inspections, et autres prestations. Le jury a demandé aux deux responsables de présenter une attestation confirmant l’exécution des services. Les juges ont également exprimé des doutes sur la propriété réelle de l’avion, affirmant que l’aéronef, après son acquisition, aurait été immatriculé dans un autre pays au nom d’une société privée.
Ben Bouyé Haïdara a précisé que le Trésor n’était pas impliqué dans la réception de l’avion, rôle dévolu à la Délégation générale des marchés publics. Toutefois, il a réaffirmé que le montant avait bien été versé et que les services étaient exécutés, attestations à l’appui.
Fily Sissoko a, de son côté, déclaré n’avoir été associée à aucune réception de l’avion, renvoyant la responsabilité au ministère des Transports et des Infrastructures. Interrogée sur l’origine des factures présentées au Trésor, elle a maintenu ne pas avoir produit de facture ou bordereau pour un montant de 15 milliards de FCFA. Cependant, le ministère public a évoqué une lettre de régularisation signée par l’ancienne ministre, ce que Bouaré Fily Sissoko a contesté, affirmant qu’il s’agissait d’une lettre de décaissement et non de régularisation.
Lors de l’audience du 30 septembre 2024, Ben Bouyé Haïdara a soutenu avoir envoyé, le 13 mars 2014, un email à Mme Fily Sissoko, mettant en copie plusieurs autres responsables, dont Moustapha Ben Barka. Il a précisé que la ministre n’avait pas répondu à ce courriel, mais que les paiements avaient été effectués sur la base de factures, même avant la signature du contrat. Il a également affirmé avoir parfois exécuté des paiements sur instructions verbales de la ministre, même pour des factures non signées.
De son côté, Bouaré Fily Sissoko a persisté à nier toute implication dans l’autorisation de ce paiement, contestant la véracité du courriel présenté par son ancien subordonné.